Sommet Franco-Allemand : Les altermondialistes d’Attac "satisfaits" mais "pas dupes"

Publié le jeudi  18 août 2011

par  Faugeron Daniel
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Interview d’Aurélie Trouvé, co-présidente d’Attac France, réalisée par LeMonde le 16 août 2011.

JPEG - 10.7 ko Nicolas Sarkozy et Angela Merkel ont annoncé, mardi 16 août, qu’ils proposeraient en septembre une taxe sur les transactions financières, sans préciser la forme qu’elle pourrait prendre. Cette taxe est réclamée depuis quelques jours par plusieurs personnalités politiques françaises, comme Jean-Louis Borloo ou Martine Aubry. Pour Aurélie Trouvé, coprésidente de l’association Attac, l’intérêt de cette taxe dépendra des modalités d’application et de l’utilisation des recettes.

Attac plaide depuis sa création pour la mise en place d’une telle taxe. C’est une victoire pour les altermondialistes ?

Aurélie Trouvé : Nous sommes évidemment satisfaits, c’est une victoire du point de vue du débat d’idées : il y a peu, on passait pour des idéalistes ou des révolutionnaires. Aujourd’hui, la proposition de taxer les flux financiers est reprise par la plupart des responsables politiques.

Mais, sur le plan de l’action, c’est autre chose. Depuis la crise de 2008, la France a joué un double jeu sur cette question. Nicolas Sarkozy a défendu cette taxe au niveau du G20, en sachant que certains pays, comme le Japon ou les Etats-Unis, refusaient franchement cette taxe. Mais quand Angela Merkel a fait des propositions en ce sens, il n’a pas pris la balle au bond. Il y a donc des avancées dans le discours, et tant mieux, mais nous devons rester très vigilants.

Quelle forme pourrait prendre une taxe sur les transactions financières ?

Tout dépendra du taux qui sera choisi, du périmètre et du caractère obligatoire de cette taxe. Nous proposons qu’elle soit d’au moins 0,05 % sur l’ensemble des transactions, ce qui permettrait de dégager plusieurs centaines de milliards d’euros. Il faut également qu’elle soit obligatoire, et pas sur la base du volontariat, ce qui ne pousserait aucun investisseur à la payer. Enfin, nous défendons une taxe au niveau mondial, gérée par l’ONU, pas simplement au niveau de l’Union européenne.

Surtout, il faut coupler cette proposition à d’autres, qui sont indispensables, comme la très forte régulation ou la suppression des paradis fiscaux. Sans cela, des mécanismes d’évasion fiscale permettront de contourner cette taxe. Il faut également des mesures de régulation drastique des marchés.

La ministre du budget, Valérie Pécresse, propose que le produit de cette taxe serve à financer l’aide au développement, mais aussi à soutenir la réduction des déficits…

Au niveau européen, les recettes de cette taxe devront [approvisionner] le budget commun de l’Union. Mais comment sera utilisé cet argent ? Si c’est pour continuer à sauver les banques sans contrepartie, à mettre en place des plans d’austérité, cela n’aura rien résolu. On restera dans un circuit clos, on prélèvera au système bancaire et financier pour lui reverser le produit de cette taxe.

Il faut mettre fin aux plans de rigueur, qui sont des mesures inefficaces et injustes, et utiliser le produit de cette taxe pour mettre en œuvre et développer une économie fondée sur le partage des richesses. Il faut investir dans les services publics, les droits sociaux, les enjeux écologiques.

En France, la mise en place d’une taxe sur les transactions financières fait, depuis peu, consensus dans la classe politique, de l’UMP au PS en passant par Jean-Louis Borloo. Les partis français sont-ils soudainement devenus altermondialistes ?

L’idée de mettre à contribution la finance et de désarmer les marchés a certes beaucoup progressé, notamment depuis la crise financière, mais nous ne sommes pas dupes : les politiques tournent autour du pot. La question de la dette va être un enjeu central de la présidentielle et personne ne pourra passer à côté. A gauche, le PS accepte les plans d’austérité en Europe et les principaux candidats à la primaire socialiste ne cachent pas qu’il faudra prendre des mesures de rigueur, s’ils l’emportent.

Nous pensons au contraire qu’on peut mettre à contribution la finance, revoir l’imposition, et qu’il faut faire un audit citoyen de la dette publique, en annulant les dettes illégitimes. Avec d’autres partenaires, nous allons d’ailleurs lancer, dès la fin du mois d’août, un comité d’audit de la dette publique française, sur le modèle de ce qui s’est fait en Équateur ou en Argentine.

Propos recueillis par Nabil Wakim


Source : Le Monde

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