« Dans le conflit social provoqué par la volonté du gouvernement de réformer les régimes spéciaux de retraite, la bataille de l’opinion publique est décisive. Chacun se souvient qu’en décembre 1995, malgré les effets de la paralysie de la SNCF et des transports parisiens, les Français avaient sympathisé, dans leur majorité, avec les grévistes. Il n’en va pas de même aujourd’hui, si l’on en croit les sondages.
À la différence de ce qui s’était passé il y a douze ans, le président de la République qui vient d’être élu et la majorité parlementaire qui le soutient ont présenté aux électeurs des engagements prévoyant explicitement cette réforme. Non seulement elle n’a pas été occultée pendant la campagne, mais elle a au contraire été mise en avant comme l’une des mesures symboliques du programme économique et social proposé par le candidat et par son parti. Les citoyens, qui n’ont pas changé d’avis en six mois, approuvent donc, dans leur majorité, l’alignement de la durée de cotisation des agents des entreprises publiques sur celle des fonctionnaires et des salariés du privé.
La tâche des médias n’en est pas facilitée. Informer sur les faits ne pose que des problèmes techniques : il faut confronter les sources, vérifier les chiffres, fournir les indications les plus récentes et les plus complètes possible.
En revanche, donner à tous ceux qui sont concernés des possibilités égales d’exposer leurs arguments est délicat. C’est le cas type d’une situation où les journalistes ne font que des mécontents. Les usagers, qui subissent la grève, ont le sentiment que ce n’est ni assez dit ni assez montré. Les grévistes estiment que leurs revendications sont récusées d’avance et que leurs raisons de s’opposer à la réforme ne sont pas prises en considération de façon équitable.
grévistes-usagers n’a rien à voir avec le débat de fond sur les retraites. L’éditorialiste du Monde peut-il envisager qu’il y ait parmi « les usagers, qui subissent la grève », des travailleurs solidaires des grévistes ?
Dans un climat de suspicion générale vis-à-vis de médias omniprésents, la tentation est de les soupçonner de parti pris. L’opinion étant majoritairement hostile à la grève, ce sont les grévistes qui se sentent victimes de la partialité supposée des organes d’information.
SUD : Ce qui, au début du commentaire, était une hypothèse basée sur des sondages est devenu un fait avéré et immuable : l’opinion est « majoritairement hostile à la grève ». N’est-ce pas du parti pris ?
Le même sentiment, poussé jusqu’à la diabolisation, est exprimé par les étudiants qui réclament l’abrogation de la loi sur l’autonomie des universités, votée cet été, et qui militent pour le blocage des établissements.
Encouragés par des sites Internet qui usent et abusent de la dénonciation des journalistes, les uns et les autres rendent les médias responsables de leur propre incapacité à convaincre l’opinion.
Des cas d’agressions verbales ont été constatés. Des reporters ont été désignés à la vindicte ou empêchés de faire leur travail.
que la présence de journalistes n’est pas toujours souhaitée, par exemple dans les Assemblées générales. Et il doit avoir le droit de mettre en question le travail de journalistes qui se croient au-dessus de la mêlée, en oubliant qu’ils sont - eux aussi - des travailleurs.
De même que les régimes politiques qui contrôlent l’information, les mouvements qui font pression sur les médias ou qui tentent de les intimider ne servent pas leur cause. Au contraire, ils l’affaiblissent. »
SUD Culture Solidaires, 23 novembre 2007
Source : http://www.sud-medias.org/
À lire également Régimes spéciaux : journalistes ou attachés de presse du gouvernement ? sur le site d’Acrimed
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